8BN-Trois rivières

20 août 2018
Claude Côté

Trois-Rivières-en-Blues a Dix Ans
Une affaire de coeur

Si la série Rally Cross du Grand Prix de Trois-Rivières est vue partout dans le monde, les clameurs du public de son festival de blues font l’unanime contentement sur la planète bleue. Déjà le dixième, du 23 au 26 août. Coup de rétroviseur et coup d’oeil sur la grille de départ.
Il y a dix ans, deux amis d’enfance ainsi que le restaurateur Dany Bruneau ont ramené le blues à Trois-Rivières après des années de disette. Les deux ex-académiciens aux Estacades, Christian Gamache, patriarche bleu et âme vibrante du festival et son comparse Éric St-Pierre, un homme d’affaire qui n’a pas son égal dans l’organisation d’événements et surtout aussi fou de musique que l’autre, se sont lancés. Avec l’aide de quelques commanditaires, une poignée d'amis et l’appui indéfectible du maire Yves Lévesque. C’était de bonne augure.

La rue Badeaux où le festival a grandi est rapidement devenu une cocotte-minute entre St-Georges et Des Forges tellement ça chauffait. Des spectacles mémorables sur ce petit tronçon de rue, il y en a eu: Big Sam’s Funky Nation, la rockabilly Nikki Hill, le soul-funk de Big James and the Chicago Playboys, le blues-rock de Popa Chubby qui débuta son spectacle avec la tonitruante Hey Joe, la pétillante mama Diunna Greenleaf, le californien Tommy Castro, le légendaire guitariste de Chicago, feu Hubert Sumlin, sur scène avec sa bonbonne d’oxygène et a fortiori, le Ice Bucket Challenge inséré entre deux spectacles pour le plus grand plaisir des festivaliers.

C’est sans compter la présence d’artistes québécois et canadiens: Nightblummers, MO Blues, Steve Hill and The Majestiks, Steve Strongman, Angel Forrest, Dawn Tyler Watson, David Gogo et oui, Just-to-Buy My Love, le bizzaroïde danseur des Denis Drolet a lui aussi laissé sa désopilante marque. On aura tout vu sur la rue Badeaux. Pour cinq dollars, incluant une bière.

Un véritable morceau de bravoure que de monter scène et espace VIP durant la nuit sur le terrain d’un petit garage qui cédait ses précieux mètres carrés au nom du blues! Un tour de force, devrions-nous dire. Les deux premières années du festival, une croisière blues était organisée. Un succès instantané. Les gens de Trois-Rivières (excusez le jeu de mot) ont embarqué. Puis le croisiériste a plié bagage et fermé boutique, sinon, vous pouvez être assurés que le volet flottant du festival serait toujours offert. Durant sa croissance, Trois-Rivières-en-blues a ajouté une scène pour les perfos acoustiques sur la rue Hart en après-midi. Entre les deux scènes: 67 secondes. Testé. Bref, même si cette scène est disparue aujourd'hui, le secteur bouillonnant autour de la rue Des Forges est toujours existant et c’est une maudite bonne affaire.

Bien sûr, l’arrivée de l’amphithéâtre Cogeco a signifié un virage important pour l’organisation. Des concerts majeurs dans une salle prestigieuse aux abords du fleuve, ça donne du poids..

La prise de risque est désormais partagée et assure sans l’ombre d’un doute la pérennité de l’événement. Z.Z. Top, Steppenwolf, Jonny Lang, Mavis Staples, Edgar Winter et Sugar Ray Rayford, pour ne nommer qu’eux, ont donnée un sérieux ‘’road test’’au somptueux édifice. Et malgré la place prépondérante qu’occupe l’amphithéâtre dans la programmation du festival, la rue Badeaux avec sa scène gratuite propose une carte alléchante: Ghost Town Blues Band, Victor Wainwright, Chris Cain, Dawn Tyler Watson, Mitch Woods, Riot and the Blue Devils, etc. C’est franchement très relevé.

C’est le dixième anniversaire cette année. L’année de Buddy Guy qui n’a rien perdu de sa verve canaille et qui ne tardera pas à mettre le feu aux poudres avec son nouveau disque, The Blues is Alive and Well. Histoire de prouver que le blues est avant tout une pulsion animale. 81 printemps pour le légendaire guitariste. Un doux plaisir que de voir enfin en chair et en os le bluesman iconique pour ceux dont ce sera une première fois. On pense aussi à George Thorogood qui m’a laissé une très forte impression après son spectacle au mois de juillet au Festival international de jazz de Montréal. Avec cette science consommée de la scène qu’il a acquise et développé sur 40 ans de carrière, avec le jeu de lumières époustouflant qui accompagne sa performance et surtout avec la cargaison de hits qu’il déballe, c’est un pari déjà remporté.

La jeune guitariste Samantha Fish en lever de rideau du blues-rockeur devrait combler les attentes du public festivalier. Un coup de coeur? Fort possiblement. Roomful of blues revient au festival avec une formule blues-swing qui garde néanmoins toute sa pertinence. Les gars de Rhode-Island ont conservés leur terrible savoir-faire et leur originalité. On risque de s’en tirer avec une bonne dose de plaisir.

Chicago plays the Stones, autre spectacle incontournable, est aussi le titre d’un album qui vient de sortir et dont la matière sera présenté en primeur mondiale. La musique des Rolling Stones vue par des bluesmen de la Ville des vents est l’un des must de cette 10e édition.. Ronnie Baker Brooks balance des riffs stoniens sur lesquels vient gambader l’harmonica de Billy Branch et leur groupe! Bien sûr, Randy Bachman est un rendez-vous obligatoire. Pas besoin de vous défiler le catalogue des Guess Who et de Bachman Turner Overdrive, le public va exulter de bonheur. Et Steve Strongman, l’ontarien au palmarès impressionnant, nous rappellera les beaux jours de la rue Badeaux.

En définitive, la dixième édition de Trois-Rivières-en-blues présente une palette assez représentative de tout ce qui se passe en blues en ce moment. Si nos héros anciens se sont engrisaillés du chef et épaissis de la bédaine, leurs musiques sont toujours bien vivantes. Des blues suintants, des boogies affolés, des guitares râpeuses, le blues est une musique qui ne s’embarrasse pas d’effets superflus, qui va droit au but. Prêts pour la grande fête?

Du 23 au 26 août
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